Didier Moulinier : La Poésie élémentaire. Défense et illustration






Ce volume rassemble les textes de Didier Moulinier portant sur l’esthétique et la poésie dite « élémentaire », concept qu’il revendique et reconstruit ici à la fois théoriquement, historiquement et pratiquement. La « Poésie élémentaire » désigne un courant plus ou moins spécifique et tentaculaire à travers le vaste continent des poésies dites « concrètes » (visuelles et sonores) et « performatives », pratiques extrêmement variées dont l’« élémentaire » pourrait bien représenter comme une idée directrice ou une sorte de fil rouge. Cet ouvrage défend et illustre – modestement mais librement et radicalement – une posture distanciée face à la « chose  poétique », réservant la primeur au pastiche et au ready-made. Une bonne partie de ces textes furent écrits par D. M. dans les années 1980-90, alors que son activité d’éditeur « underground » battait son plein, et certes il ne sera pas inutile de les resituer dans leur contexte. Pour autant si ces recherches et expérimentations ne peuvent prétendre illustrer une quelconque « actualité » artistique ou poétique, elles n’en demeurent pas moins frayantes, décapantes et assurément contemporaines
Deux grands ensembles structurent cet ouvrage : une première partie théorique dite de défense («Introduction à la Poésie élémentaire », articles) et une seconde dite d’illustration pratique (« Mélanges et pastiches », poèmes).


Version numérique disponible multiformats (9,49 €)


Michel Valprémy en bref et en revues

 


(transcription d'une conférence dite lors de l'après-midi "Michel Valprémy" à la MSH de l'Université de Bordeaux III, le 01/10/2025)

 

Introduction

Je m'adresse ici à vous en tant qu'éditeur, et non en tant que « critique littéraire » (cf. François Huglo)… Et d'autre part, le MV dont je vais vous parler n'est pas tant l'écrivain (celui qui écrit des livres) que le poète, je veux dire celui qui écrit des textes. Cette opposition, hautement contestable en théorie, sonne d’emblée comme une provocation, mais elle s’avère pratique pour introduire mon sujet. D’ailleurs un autre poète de la fin du 20è, Christophe Tarkos, a pu écrire ceci : "je ne sais pas faire de livre parce que je fais des poèmes". Je précise tout de suite que ce n'est pas le cas de MV (ni de Tarkos d’ailleurs, par la suite), mais je vais quand-même me concentrer sur le poète, l'auteur de textes courts, et sur un certain mode de publications, les revues. Je regrouperai mes propos en trois temps, trois parties. Une première partie très rapide que je qualifierais d'anecdotique et de semi-biographique pour vous situer un peu l'époque où intervenait Michel Valprémy dans l'édition locale, parce que ce fut l'occasion de notre rencontre et de notre collaboration. Une deuxième partie plus générale (sans privilégier à ce stade le cas de MV) pour poser quelques repères indispensables s'agissant d'articuler un certain contexte historique, culturel, technologique, je dirais médiologique, et bien entendu éditorial, et ses conséquences sur les formes mêmes de la création poétique. En l'occurrence précisément comment les moyens éditoriaux précaires qu'étaient les revues photocopiées et les fanzines encourageaient des formes d'expression singulières, mixtes et hybrides, "concrètes", courtes, et étonnamment inventives. Enfin une troisième partie focalisée cette fois sur les créations de MV, justement dans leur particularité, leur diversité, leur polyphonie, leur aspect foisonnant, telles qu'on les trouve disséminées dans une multitude de "petites" revues, y compris les miennes donc. Je conclurai par une interrogation sur l'accueil qui peut être fait aujourd'hui à cette œuvre, et plus globalement à l'esprit même de son époque ; quelle postérité pour ces publications "underground", celles de MV et d'autres, que sont-elles devenues, que vont-elles devenir, quelle influence sur la génération actuelle ? ; quels enjeux pose l'archivage de ces œuvres et, peut-être même, de ces réseaux éditoriaux comme tels ? ; qu'est-ce qui les rend nécessaires et vivantes, précieuses même, ces archives, par l'étrangeté de quel désir, de quel amour, de quel fétichisme improbable et bienvenu ?